Créé il y a un an par les équipes de Fisheye, Focus est un format vidéo innovant qui permet de découvrir une série photo en étant guidé·e par la parole de leur auteurice. Cette narration originale à travers une mosaïque d’images et un habillage sonore nous entraîne dans un parcours immersif aussi sensible que stimulant.
Matilde Søes Rasmussen
Coup de coeur de Lou Tsatsas
« Le cynisme vient de mon désir de me présenter comme cette industrie me voit : je suis un produit pour une marque, un récipient vide. Et plus je le suis, mieux je peux porter ce que les gens me demandent de porter », déclare Matilde Søes Rasmussen. À coups de flashs crus, de maquillages dramatiques et de gros plans inesthétiques, la photographe dano-suédoise et mannequin nous emporte dans l’envers d’un décor trop brillant pour être vrai : le monde de la mode. Avec un humour mordant, elle révèle le journal de bord surréaliste de son expérience professionnelle en Chine. Entre interrogations intimes et récit visuel, elle interroge les travers de l’industrie : le rapport toxique au corps et au poids, le rejet constant, la capitalisation outrancière… Un monde de contradictions où se croisent l’ennui, la laideur, la violence et le sublime.
Anaïs Boudot
Coup de coeur de Cassandre Thomas
Ancienne élève de l’École nationale supérieure de la photographie d’Arles et du Fresnoy – Studio national des arts contemporains, Anaïs Boudot excelle dans l’expérimentation du médium. Dans Les Oubliées, la photographe présente une série de portraits manipulés à partir d’anciens négatifs sur verre, à l’instar des plaques de Brassaï et de Picasso. Un travail d’une extrême minutie qui semble de prime abord rendre hommage à des colosses du monde de l’art. Mais ce projet affiche une tout autre ambition. Il interroge la place des femmes artistes, et plus particulièrement les violences commises par Picasso sur ces dernières. À travers des bribes de podcasts relatant ces faits misogynes et répressifs, la voix et les oeuvres d’Anaïs Boudot portent un regard féministe sur un milieu artistique trop longtemps sous le joug patriarcat.
Matthieu Gafsou
Coup de coeur d’Ana Coderot
Photographe installé en Suisse, Matthieu Gafsou a toujours entretenu un rapport fort à l’écologie. D’une posture tantôt nihiliste et utopiste, il réalise Vivants : un projet aux multiples strates qui se penche sur l’effondrement de notre monde. Là où beaucoup choisissent de rester dans une représentation pessimiste de notre environnement, le photographe entend quant à lui injecter des mirages de tendresse. Cela passe notamment par la représentation de ses propres enfants – porteurs d’espoir et messagers de lendemains radicalement meilleurs –, mais également par la préciosité de ses images. Car sur quelques-uns de ses tirages, il a fait réagir du pétrole. Le résultat ? La quasi-totalité des couleurs a été effacée au profit d’un aspect nébuleux et doré. Comme une manière de montrer que même si les choses se dilatent, quelques éclats de beauté demeurent inchangés. Un conte impactant oeuvrant à la poétisation de nos écosystèmes.