Aurélie Scouarnec et Laurent Spadotto, nos coups de cœur #458, prêtent une attention particulière à la fragilité du monde, que celui-ci soit sensible ou intelligible. La première s’intéresse aux animaux sauvages blessés, recueillis dans des centres de soins, quand le second matérialise ses émotions pour mieux panser son âme.
Aurélie Scouarnec
Si l’urbanité domine en région francilienne, nombre d’espèces sauvages peuplent encore ces lieux où la cohabitation est souvent malaisée. Au début de l’année 2020, Aurélie Scouarnec a commencé à fréquenter deux espaces qui recueillent les animaux blessés, situés en périphérie parisienne, à mi-chemin entre la métropole et les zones plus rurales. « Avec plus de 7 000 accueils par an, Faune Alfort et ses partenaires gèrent la plus grande structure de soins à la faune sauvage en France. L’association des Rémiges Noires, localisée à Chennevières-sur-Marne, est quant à elle spécialisée dans la prise en charge du martinet noir, oiseau aux besoins très spécifiques », précise-t-elle. Au cours des deux années qui suivent, la photographe immortalise les gestes des vétérinaires et des bénévoles qui officient sur place, à tour de rôle, dans une série intitulée Feræ ou « sauvage » en latin. À la manière d’un rituel, « les mains nourrissent, rééduquent, pansent et nettoient » et tentent de réparer les liens avec le vivant. Au fil des images se dresse ainsi un récit sensible qui rappelle toute la précarité de ces espèces dont les apparitions se font de plus en plus rares.
Laurent Spadotto
Dans des monochromes contrastés, des silhouettes bavent, des monuments s’étirent à mesure de la brume gagne du terrain. « Je suis plutôt solitaire, mais j’aime me retrouver en compagnie d’ami·es que je n’ai jamais rencontré·es. Une tribu éclectique où l’on se côtoie, Alexey Titarenko, Diane Arbus, David Lynch, Jack London, Alfred Hitchcock, The Cure, Nick Cave et bien d’autres, avec une affection toute particulière pour Jean Cocteau. Très tôt, j’ai suivi avec détermination son conseil : “Ce que le public te reproche, cultive-le, c’est toi.” », explique Laurent Spadotto, à l’origine de ces compositions. Animé par une envie de s’exprimer d’une tout autre façon, ce journaliste de profession décide de s’essayer à la photographie en 2020. Comme pour prolonger son travail d’écriture et de réalisation de courts-métrages, dans lequel il s’est lancé au début des années 2020, l’artiste bordelais pense ses séries à la manière de chapitres constituant un même récit. Fade et Salavation, ses deux projets qu’il considère comme étant achevés, raconte le voyage introspectif, cathartique et chaotique, qu’il a mené jusqu’à atteindre une sérénité salvatrice.