Natalia Jacott et Viviana Bonura, nos coups de cœur de la semaine, ont en commun la pratique de l’autoportrait. Par ce biais, toutes deux entendent déconstruire les regards et célébrer l’empathie.
Natalia Jacott
Née a ayant grandi à Mexico City, Natalia Jacott a commencé sa pratique par des autoportraits nus. Ce genre l’accompagne jusqu’à aujourd’hui, alors qu’elle articule sa pratique autour de la nudité, de la vulnérabilité et de l’intimité, et leurs liens réciproques. « Je travaille actuellement sur l’étude du regard et sur ce qu’il convoque, à partir de ce qui est vu au premier coup d’œil et ce qui est perçu après, précise-t-elle. « Ce thème particulier est né de mon intérêt personnel pour la compréhension de la construction de la mienne. C’est l’essence du regard du photographe qui convoque la qualité intangible de l’image, tout en proclamant son individualité », poursuit-elle. Au creux de son œuvre semble régner, paisible et inusable, le pouvoir de l’empathie. Le travail aiguisé qu’elle mène autour de la couleur et de la perspective lui permet d’imaginer des espaces de recueillement, où chacun·e peut se reconstruire et remodeler les liens qui le ou la nourrissent. Parsèment ses images toutes ces choses qui l’inspirent au quotidien que sont, entre autres, « les érables, les ciels étoilés, les couchers de soleil, les gens, les conversations, la tendresse, la musique, les océans, les artistes… », énumère-t-elle.
Viviana Bonura
Dans Born From Salt, Viviana Bonura cristallise une renaissance qui découle de tâtonnements artistiques. Au travers d’autoportraits monochromes, elle entreprend une réappropriation de son corps par l’image. « Le nom du projet vient d’un rêve où, au lieu d’utérus, les êtres humains naissaient d’une sorte de matière qui marque ce que nous sommes. Là, je suis née du sel. Blanc comme ma peau, immobile et lourd. Le sel est réputé pour sa capacité à conserver les choses, mais dans certaines histoires, il est le protagoniste de rites superstitieux. S’il est jeté par erreur sur la table, c’est un signe de malchance, mais c’est aussi un puissant purificateur d’énergies négatives. Il éloigne les monstres », explique-t-elle. S’inscrivant dans une philosophie de la sollicitude, la photographe sicilienne appréhende sa création tel un outil de guérison qui s’impose également comme « une responsabilité sociale ». « Avec l’âge, je me rends compte qu’il est urgent pour moi de participer activement à la société et que je me préoccupe des implications culturelles et sociales des images. Notre imaginaire est façonné par ce que nous voyons et je me demande comment je peux contribuer à la décolonisation et à la déconstruction du monde de l’art par des pratiques insubordonnées », assure-t-elle.