Tommy Keith et Patrick Gilliéron Lopreno, nos coups de cœur de la semaine, dépeignent le paysage alentour chacun à leur manière. Le premier s’intéresse aux nuances du front de mer quand le second poétise la réalité au travers de compositions monochromes.
Tommy Keith
Photographe passionné, initié par son grand-père, Tommy Keith vit à Toronto. Fasciné par la relation complexe entre nature et paysage urbain, il s’intéresse à la représentation de ces dynamiques et à l’emploi de ces espaces. Plus particulièrement au sein de communauté qui règne sur le front de mer, qu’il fréquente régulièrement, où il aborde des inconnu·es afin de les photographier. Il décrit le bord de l’eau de manière intense et vivante : « La vie s’épanouit dans ce petit bout d’espace public coincé entre le lac Ontario et l’autoroute Gardiner. L’autoroute est animée par un flot continu de voitures qui contraste avec le doux clapotis des vagues sur le rivage, tandis que les gens se taillent leur propre espace entre ces forces omniprésentes. Parfois, cette zone ressemble à un répit de la ville, alors qu’à d’autres moments, c’est un écosystème animé d’activités au bord du lac ». Témoin privilégié de l’énergie et de la vie qui s’y meuvent, Tommy Keith nous fait don, avec ses images, de quelques-unes des émotions mémorables qu’il traverse dans cet environnement.
Patrick Gilliéron Lopreno
Une brume épaisse se confond au grain de l’image. Un papillon ornemente un motif fait de divers feuillages. La silhouette d’une colline enneigée coupe un ciel légèrement plus foncé. Ces tableaux, signés Patrick Gilliéron Lopreno, sont issus de U-Turn, série et ouvrage qui achève une trilogie entamée en 2018. Dans ce nouveau projet, le photographe genevois « défend l’importance d’un ordre spirituel dans l’espoir de surmonter notre désunion et de recréer une unité entre la nature et les êtres ». Portées par une esthétique cinématographique, influencée par les œuvres d’Andreï Tarkovski, de Terrence Malick et de Béla Tarr, ses images transposent la réalité brute dans un monde poétique. « Ernst Jünger a écrit ceci : “Ce n’est ni dans les choses du passé ni dans les utopies que l’on saisit le merveilleux, mais dans le présent.” Et il a totalement raison », assure-t-il. Ce volume, comme les précédents, trouve aussi matière dans la littérature, et plus particulièrement dans les textes de Robert Walser, Gustave Roud, Peter Handke et Zéno Bianu. « Je travaille, pour mes livres, en étroite collaboration avec un écrivain avec qui j’ai une vraie affinité et une totale confiance », ajoute-t-il.