L’œil est double, trouble, dans un carcan flou de pourpre et de violet. Il fixe l’objectif autant qu’il s’en détourne. Était-ce un idéal ? Les clichés de Sergey Skip regardent en face comme de biais pour faire naître l’image – et la subjectivité qui lui est liée. Ils explorent, selon l’auteur, « les obsessions, les pensées parasitées, l’anxiété, la paranoïa pour s’engager dans des réponses émotionnelles, moins positives que sensuelles ». S’immerger, donc, dans le portrait, jusqu’à l’abstrait, l’aplat presque pictural des couleurs qui se mêlent et s’annulent. Entre Berlin, où il vit, et Lisbonne dont il aime la campagne en hiver, les influences de Sergey Skip sont plutôt à chercher du côté du Dublinois Bacon dont il partage les admirations (Caravage, les expressionnistes…). « L’odeur du sang humain ne me quitte pas des yeux », disait d’ailleurs le peintre, citant Eschyle. Elle transpire ici d’une bouche ouverte aux dents démultipliées, des corps en performance où le regard projette et reconstruit d’impossibles proportions. L’émotivité du flou embrasse les paysages – les rues et trams de Lisbonne – pour faire du photographe un bateau ivre dont la technique est une pudeur paradoxale. Sergey Skip le concède : il prend des portraits pour « décrire quelque chose qu’[il] ne peut pas verbaliser, ou analyser, mais dont [il] peux faire l’image ». Loin d’un « scepticisme post-moderne », sa subjectivité s’affranchit de l’influence des maîtres, si prégnante soit-elle. « Certaines personnes voient la photographie comme une forme d’impasse (en comparaison de la peinture, ndlr), mais même si elle l’était, je crois que celle-ci n’a pas encore été totalement explorée.
Sergey Skip : sortir de l’œil des maîtres
© Sergey Skip
À lire aussi
C’est à l’occasion de l’annonce de finalistes du prix Picto de la Photographie de Mode 2023 que nous avons découvert une nouvelle facette…
Fasciné par le cinéma et la psychologie, le jeune artiste serbe Vladimir Janic compose, en noir et blanc, un récit troublant où tout est…
Explorez
© Mathias Zwick / Inland Stories. En jeu !, 2023
Quelle meilleure façon de démarrer les Rencontres d’Arles 2025 qu’avec un battle d’images ? C’est la proposition d’Inland Stories pour la...
© Vanessa Stevens
Expositions, immersion dans une série, anecdotes, vidéos… Chaque mois, la rédaction de Fisheye revient sur les actualités photo qui l’ont...
Contenu sensible
06:31
© Fisheye Magazine
C’est l’heure du rendez-vous Focus ! Alors que sa série Only You and Me se dévoilera prochainement sur les pages de Sub #4, Sofiya...
© Jean Caunet / Instagram
Les monstres, les créatures étranges et hors normes sont souvent associés au laid, au repoussant. Les artistes de notre sélection...
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Sein und werden Être et devenir. FREELENS HAMBURG PORTFOLIO REVIEWS © Simon Gerliner
Les expositions photographiques se comptent par dizaines, en France comme à l’étranger. Les artistes présentent autant d’écritures que de...
© Louise A. Depaume, Trouble / courtesy of the artist and festival Les Femmes et la mer
Cette année, le festival photographique du Guilvinec, dans le Finistère, prend un nouveau nom le temps de l'été : Les femmes et la mer....
© Mathias Zwick / Inland Stories. En jeu !, 2023
Quelle meilleure façon de démarrer les Rencontres d’Arles 2025 qu’avec un battle d’images ? C’est la proposition d’Inland Stories pour la...
© Nicholas Ip / Instagram
Annonçant la fin de l’été, le mois de septembre est pour beaucoup synonyme de rentrée. Source d’enthousiasme pour certain·es...