Jusqu’au 3 mars, le musée de Grenoble présente Une histoire d’images, premier bilan du fond de photographies rassemblé ces quatre dernières années grâce aux dons d’Antoine de Galbert et sa fondation. L’exposition met en lumière le rôle de la photographie dans l’image que nous nous faisons du monde contemporain.
Depuis 2020, le collectionneur Antoine de Galbert soutient le musée de Grenoble à travers d’importants dons d’images. Une première exposition de ce fond photographique impressionnant avait été organisée en 2019, Souvenirs de voyage. Avec Une histoire d’images, l’idée n’est pas de répondre à un ordre chronologique ou thématique, mais de proposer des œuvres qui esquissent la vision d’un état du monde, sans manichéisme ni a priori. Parmi ces images, nous retrouverons des événements marquants, des figures emblématiques, des portraits bouleversants… Des visages, des corps, des hommes et des femmes aux destins parfois tragiques, révélant une humanité prise dans une Histoire qui la dépasse. L’exposition dresse un bilan subjectif et objectif de notre époque, à travers 270 œuvres parfois composées d’un grand ensemble d’images, réalisées par 95 photographes connus ou anonymes, de Dorothea Lange à Wiktoria Wojciechowska, de Paul Strand à David Goldblatt, de Luc Delahaye à Gilles Raynaldy.
Raconter le monde contemporain
Parmi les photographes que le fond Antoine de Galbert met en avant, on retrouve certains noms en particulier qui ont façonné l’histoire du 8e art au siècle dernier. Avec leurs images, ils et elles ont raconté le monde contemporain et nous ont ouvert les yeux sur ses réalités. Dorothea Lange fait partie de ces noms, avec sa série bouleversante sur le système judiciaire en Californie : elle photographie le palais de justice du comté d’Alameda à Oakland, puis elle reçoit l’autorisation exceptionnelle de photographier dans le tribunal et dans les cellules de la prison et réalise plus de 450 clichés. Son approche presque anthropologique, transforme les images en des métaphores dont il faudrait lire entre les lignes. Les portes criblées de coups d’une camionnette de police renvoient à la vie des détenu·es. Nous rencontrons dans l’exposition un cliché de Martin Parr, nom incontournable de la photographie contemporaine. Avec The Queen visiting the Draper’s Livery Hall on their 650th Anniversary capturé en 2014 à Londres, il réaffirme son sens de l’humour et sa capacité à désacraliser les symboles. Il choisit de la représenter de dos, à rebours des conventions, même si la souveraine est immédiatement reconnaissable du fait de l’aura qu’elle dégage et de l’admiration qu’elle suscite. Bernard Descamps fait aussi partie de la collection, avec sa série consacrée au peuple des Pygmées Aka, qu’il a rencontré lors de ses cinq séjours en Centrafrique entre 1995 et 2000. Dans le portrait choisi pour l’exposition, Boko, chasseur pygmée, s’apprête à entamer la chasse du jour. Guy Tosatto, directeur du musée, et Antoine de Galbert, curateur de l’exposition, affichent à travers cette sélection une passion pour l’Histoire et ses bégaiements. Alors que nous pensons tout connaître, à l’ère de l’hyper-connectivité, la photographie, nous dévoile encore des histoires, situations et personnages dont nous ignorons tout.