Dans l’œil de Justine Valençon : la jouissance sentimentale ou la dualité de l’amour

08 janvier 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Dans l’œil de Justine Valençon : la jouissance sentimentale ou la dualité de l’amour
© Justine Valençon
JustineValençon
« Aujourd’hui, on met surtout l’accent sur le plaisir, en oubliant que cette souffrance fait partie de l’existence humaine. C’est ce que j’ai voulu évoquer à travers cette photographie : ce sentiment que l’on repousse, comme la peste à l’époque, pour essayer d’aller mieux. »

Cette semaine, plongée dans l’œil de Justine Valençon, que nous avions déjà rencontrée au cours de l’été 2022. Au fil de ses différents projets, la photographe belge décline ses visions de la féminité. Pour Fisheye, elle revient sur l’un de ses collages, extrait de Fe(male), une série qui évoque la sentimentalité au travers de quatre personnages phares.

« Il s’agit de l’image centrale de la série que j’ai appelée Fe(male). Elle s’inspire des médecins qui, en Europe, au XVIIe siècle, soignaient les victimes de la peste. Ils portaient ces fameux masques dotés d’un long bec d’oiseau afin de se protéger de la maladie, qui était alors le mal le plus redouté au monde. Ils pensaient que cela fonctionnait, mais, malheureusement, ce n’était pas le cas. Je me suis dit que c’était assez représentatif de ce que je voulais exprimer ici par rapport à l’amour : un mélange d’espoir et de peur. Cette image en particulier est donc, selon moi, l’allégorie de la “jouissance sentimentale”. C’est le jouir et le souffrir qui se rejoignent en une seule et même chose, incarnée par la mariée confiante et par le haut de la photo, beaucoup plus triste. 

La jouissance sentimentale, qu’est-ce que c’est sinon l’épreuve d’une relation ? Lorsque l’on aime quelqu’un, il y a cette crainte que la personne nous échappe, il faut parfois surmonter des peines, des phases de doutes, il faut assumer sa vulnérabilité… On se retrouve au cœur d’une expérience assez pénible et extrêmement heureuse à la fois. Cela va à l’encontre de l’utopie amoureuse véhiculée dans les livres ou dans les films qu’on lit et regarde dès notre plus jeune âge. Aujourd’hui, on met surtout l’accent sur le plaisir, en oubliant que cette souffrance fait partie de l’existence humaine. C’est ce que j’ai voulu évoquer à travers cette photographie : ce sentiment que l’on repousse, comme la peste à l’époque, pour essayer d’aller mieux. Finalement, l’amour est une expérience anti-idyllique. Donner une telle caution à l’utopie revient à se refuser d’accepter ce qu’il faut vivre dans cette expérience. »

À lire aussi
Dans l’œil d’Emma Sarpaniemi : les dessous de l’affiche des Rencontres d’Arles
Autoportrait en Cindy, 2022, série Deux façons de porter un chou-fleur © Emma Sarpaniemi
Dans l’œil d’Emma Sarpaniemi : les dessous de l’affiche des Rencontres d’Arles
Cette semaine, plongée dans l’œil d’Emma Sarpaniemi. Si son œuvre est actuellement présentée dans le cadre de l’exposition…
07 août 2023   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Dans l'œil de Sander Coers : introspections imaginées
© Sander Coers
Dans l’œil de Sander Coers : introspections imaginées
Cette semaine, plongée dans l’œil de Sander Coers. Ayant figuré à plusieurs reprises sur les pages du site web, fait la couverture d’un…
11 septembre 2023   •  
Écrit par Ana Corderot
Explorez
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
© Sara Lepore / Instagram
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
La maison se fait à la fois abri du monde et porte vers le dehors, espace de l’intime et miroir de nos modes de vie. Les artistes de...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
5 coups de cœur qui témoignent d'un quotidien
I **** New York © Ludwig Favre
5 coups de cœur qui témoignent d’un quotidien
Tous les lundis, nous partageons les projets de deux photographes qui ont retenu notre attention dans nos coups de cœur. Cette semaine...
15 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Les images de la semaine du 8 septembre 2025 : amour et déplacements
Couldn't Care Less © Thomas Lélu et Lee Shulman
Les images de la semaine du 8 septembre 2025 : amour et déplacements
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, l’amour et les déplacements, quels qu’ils soient, ont traversé les pages de Fisheye. Ceux-ci se...
14 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Arpita Shah et la transmission des récits féminins
© Arpita Shah
Arpita Shah et la transmission des récits féminins
À travers sa série Nalini, la photographe indo-britannique Arpita Shah explore l’histoire de sa famille et des générations de...
12 septembre 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Ekaterina Perfilieva et l'intime au cœur de la fracture
© Ekaterina Perfilieva, Nocturnal Animals
Ekaterina Perfilieva et l’intime au cœur de la fracture
À la fois distante et profondément engagée, Ekaterina Perfilieva, artiste multidisciplinaire, interroge une contemporanéité...
17 septembre 2025   •  
Écrit par Milena III
Le 7 à 9 de Chanel : Valérie Belin et la beauté, cette quête insoluble
© Valérie Belin
Le 7 à 9 de Chanel : Valérie Belin et la beauté, cette quête insoluble
L’heure des rencontres « 7 à 9 de Chanel » au Jeu de Paume a sonné. En cette rentrée, c’est au tour de Valérie Belin, quatrième invitée...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Ana Corderot
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
© Sara Lepore / Instagram
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
La maison se fait à la fois abri du monde et porte vers le dehors, espace de l’intime et miroir de nos modes de vie. Les artistes de...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
5 coups de cœur qui témoignent d'un quotidien
I **** New York © Ludwig Favre
5 coups de cœur qui témoignent d’un quotidien
Tous les lundis, nous partageons les projets de deux photographes qui ont retenu notre attention dans nos coups de cœur. Cette semaine...
15 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet