« La juxtaposition de ces deux mots, “selling” et “paradise”, sur ce panneau publicitaire a immédiatement attiré mon attention et je me suis arrêté au bord de la route qui relie Paradise à la ville principale des environs, Chico, afin de prendre cette photographie. »
128 pages
65 photographies couleur
À partir de 45 €
Cette semaine, plongée dans l’œil de Maxime Riché. Dans Paradise, projet que nous vous présentons sur les pages du Fisheye #64, le photographe raconte l’histoire d’une ville américaine ravagée par deux mégafeux : Camp Fire, en 2018, et Dixie Fire, en 2021. Pour Fisheye, il revient en détail sur l’une de ses images. Cette série fera l’objet d’un bel ouvrage, d’ores et déjà disponible en précommande, à paraître en septembre prochain chez André Frère Éditions.
« Pour moi, cette image est symbolique car elle représente toute l’ironie de la situation autour de l’histoire de la ville de Paradise, en Californie : après le drame du mégafeu Camp Fire, en 2018, nombre des 26 000 personnes qui y vivaient n’ont pas pu revenir faute de moyens financiers. Certaines avaient dépensé toutes leurs économies pour se loger à l’hôtel après avoir perdu leur demeure, d’autres avaient perdu leur travail car les commerces et entreprises avaient brûlé également. Les promotrices et promoteurs immobiliers tentaient alors d’attirer des propriétaires pour reconstruire sur les terrains sinistrés.
La juxtaposition de ces deux mots, “selling” et “paradise”, sur ce panneau publicitaire a immédiatement attiré mon attention et je me suis arrêté au bord de la route qui relie Paradise à la ville principale des environs, Chico, afin de prendre cette photographie. J’ai utilisé une diapositive infrarouge couleur pour cette image car je voulais lui donner une intention un peu surnaturelle, décalée de la réalité, qui peut également introduire un certain regard critique, ce que j’essaie toujours de faire en tant qu’artiste, en apportant une interprétation personnelle aux scènes que je photographie.
Ce qui me plaît, dans ce cliché, c’est également de faire une citation d’un courant de photographie américaine qui a souvent traité les carrefours, les poteaux électriques et les panneaux de bords des routes. Je pense à Joel Sternfeld et au maître du genre, Stephen Shore. Cette image capture à la fois la culture du lieu et la dimension critique de l’histoire de Paradise. Elle me fait un peu sourire intérieurement, du moins elle me fait réagir quand je la regarde ! »