Empathie, limules et changement climatique : dans la photothèque d’Alice Pallot

24 janvier 2024   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Empathie, limules et changement climatique : dans la photothèque d’Alice Pallot
Si tu devais ne choisir qu’une seule de tes images, laquelle serait-ce ? © Alice Pallot
© Alice Pallot

Des premiers émois photographiques aux coups de cœur les plus récents, les auteurices publié·es sur les pages de Fisheye reviennent sur les œuvres et les sujets qui les inspirent particulièrement. Aujourd’hui, Alice Pallot nous ouvre les portes de son imaginaire aussi engagé que poétique. À travers ses inspirations et ses créations, l’artiste ne cesse d’explorer notre société et de questionner l’impact de l’être humain sur les dérèglements de la planète. 

Si tu devais ne choisir qu’une seule de tes images, laquelle serait-ce ? 

Je choisirai From the eyes of a seaweed qui permettrait à mon sens de comprendre que l’idée d’empathie et d’anticipation d’un futur proche est importante pour créer une forme de synergie collective.

La première photographie qui t’a marquée et pourquoi ?

Il s’agit d’une des images de Almerisa Sehric de Rineke Dijkstra. Cette série documente comment la jeune fille évolue au fil des années. La photographe a rencontré Almerisa Sehric dans un centre de réfugiés pour demandeurs d’asile bosniaques aux Pays-Bas, en 1994. Elles décrivent chacune l’expérience de leur première photographie, ensemble, et discutent de la manière dont la série évolue au cours de la vie d’Almerisa. 

J’ai découvert cette série en 2005, au Jeu de Paume. Cela a été le déclencheur à ma volonté de devenir photographe, j’avais 10 ans. J’ai été touchée par son double point de vue, entre le contexte général, la simplicité des compositions et en même temps quelque chose qui relève d’une puissance de la sphère individuelle. 

© Alice Pallot
© Alice Pallot
© Alice Pallot

Un shooting rêvé ?

Une résilience/renaissance d’un lieu abîmé par une action anthropique, qui se régénère de manière visuelle et photogénique et qui serait le symbole de la fin d’une ère comme celle de l’Anthropocène et du capitalisme morbide. 

Un ou une artiste que tu admires par-dessus tout ? 

Pierre Huygue, pour son rapport synergique avec le vivant, sa vision singulière, expérimentale et immersive de l’exposition, sa façon de raconter la société en étant narratif et en invoquant une réflexion sur notre action en tant qu’être humain, ainsi que notre trace dans le futur. 

Une émotion à illustrer ?

L’empathie.

Un genre photographique ?

Le documentaire d’anticipation.

© Alice Pallot
© Alice Pallot

Un territoire, imaginaire ou réel, à capturer ?

Le territoire abyssal, dans lequel les limules auraient un pouvoir d’invisibilité, leur permettant de disparaître à l’approche des prédateurs humains. La limule est un animal vieux de 450 millions d’années, aujourd’hui en voie d’extinction. Elle est exploitée pour son sang bleu qui est un composant permettant d’élaborer les vaccins. J’aimerais être une petite bulle d’air me faufilant dans le territoire de ces créatures si intrigantes, qui ont connu l’âge de glace, l’asphyxie au carbone, les chutes d’astéroïdes, l’extinction des dinosaures… Et ont survécu.

Une thématique que tu aimes particulièrement aborder et voir aborder ? 

La thématique du changement climatique et de son impact, de l’action anthropique de l’être humain sur la nature, basée sur des faits scientifiques, de vulgarisation des connaissances, de désanthropisation du point de vue, de justice environnementale et malgré tout cela, de réinterprétation d’un imaginaire de beauté alertante.

Une exposition photographique que tu n’oublieras jamais ?

Ce serait plutôt une exposition de vidéo immersive : Opera de Dominique Gonzalez- Foerster à la Bourse du commerce, et No More Reality de Philippe Parenno à la Fondation LUMA. 

Une œuvre d’art qui t’inspire particulièrement ? 

Le long métrage Les Garçons Sauvages de Bertrand Mandico. Cinq femmes jouent cinq jeunes hommes épris de liberté comme d’un crime sauvage. Les garçons se métamorphosent, de manière sensible, à travers une esthétique fantasmagorique de collage, qui dépeint une société sans hommes à l’écart du monde. Ces possibilités d’un ailleurs si réaliste a fait écho en la construction d’autres mondes auxquels j’aime croire.

© Alice Pallot
© Alice Pallot
© Alice Pallot
À lire aussi
Abysses, existence, photojournalisme : dans la photothèque d’Orianne Ciantar Olive
© Orianne Ciantar Olive
Abysses, existence, photojournalisme : dans la photothèque d’Orianne Ciantar Olive
Des premiers émois photographiques aux coups de cœur les plus récents, les auteurices publié·es sur les pages de Fisheye reviennent sur…
10 janvier 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Daido Moriyama, ivresse et mystère, dans la photothèque d’Elie Monférier
© Elie Monferier
Daido Moriyama, ivresse et mystère, dans la photothèque d’Elie Monférier
Des premiers émois photographiques aux coups de cœur les plus récents, les auteurices publié·es sur les pages de Fisheye reviennent sur…
21 décembre 2023   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Hadès, Antoine d’Agata et Deauville, dans la photothèque de Céline Croze
© Céline Croze
Hadès, Antoine d’Agata et Deauville, dans la photothèque de Céline Croze
Des premiers émois photographiques aux coups de cœur les plus récents, les auteurices publié·es sur les pages de Fisheye reviennent sur…
07 décembre 2023   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Explorez
Pooya Abbasian remporte la 3e édition du prix Art & Environnement
Oxalis (détail), 2024 © Pooya Abassian
Pooya Abbasian remporte la 3e édition du prix Art & Environnement
Lee Ufan Arles et la Maison Guerlain ont annoncé hier, à la Guerlain Academy, le nom du troisième lauréat de leur prix Art &...
08 octobre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
La sélection Instagram #527 : l'être-nature
© Tetsuo Kashiwada / Instagram
La sélection Instagram #527 : l’être-nature
Trop souvent l’être humain s’est pensé extérieur au monde naturel. Capitalisme et mondialisation en sont en partie responsables. Si la...
07 octobre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
InCadaqués 2025 : des images entre le vent et la mer
The Wave, Jamaica, 2013 © Txema Yeste, courtesy of Galería Alta
InCadaqués 2025 : des images entre le vent et la mer
Du 9 au 26 octobre 2026, le village côtier de Cadaqués, en Catalogne, devient le théâtre du monde de l’image. Quarante photographes, en...
03 octobre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Photoclimat 2025 : la photographie au service de l’environnement
© Juliette-Andréa Élie / Fondation Avril
Photoclimat 2025 : la photographie au service de l’environnement
Jusqu’au 12 octobre 2025, la 3e édition de la biennale Photoclimat prend ses quartiers à Paris. De la place de la Concorde à celle de...
27 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Gabrielle Ravet : de l'autre côté du poster, la ferveur des fans
© Gabrielle Ravet
Gabrielle Ravet : de l’autre côté du poster, la ferveur des fans
Entre New York et les salles de concert, la photographe française Gabrielle Ravet explore les communautés de fans comme on scrute une...
28 octobre 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
La sélection Instagram #530 : une étrange nuit d'octobre
© verknipts / Instagram
La sélection Instagram #530 : une étrange nuit d’octobre
Dans la brume, dans les ciels sombres, dans les forêts épaisses, les artistes de la sélection Instagram de la semaine célèbrent les...
28 octobre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Une danse entre la vie et la mort capturée par Oan Kim
Le coup de grâce lors d'une corrida à Madrid © Oan Kim/MYOP
Une danse entre la vie et la mort capturée par Oan Kim
À travers un noir et blanc contrasté, qui rappelle la chaleur sèche de l'Andalousie, Oan Kim, cofondateur de l'agence MYOP, montre...
27 octobre 2025   •  
Écrit par Milena III
5 coups de cœur qui utilisent le noir et blanc
© David Zheng
5 coups de cœur qui utilisent le noir et blanc
Tous les lundis, nous partageons les projets de deux photographes qui ont retenu notre attention dans nos coups de cœur. Cette semaine...
27 octobre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet