Céline Guillerm et le duo composé par Noémie Lecampion et Léo Duthoit, nos coups de cœur #466, utilisent le médium pour cristalliser des visions du monde. La première s’immisce au cœur des compétitions de la lucha canaria et de l’engouement qu’elle suscite, quand le couple s’intéresse à la pression sociale que ressentent les jeunes adultes.
Céline Guillerm
En plein confinement, Céline Guillerm, alors en soif de voyage, déambule dans les paysages de Lanzarote, une île des Canaries, grâce à l’outil Google Street View. Elle y observe virtuellement des volcans ainsi que les différentes textures de sols et de roches. « Je m’y suis rendue véritablement en décembre 2022. Je pensais en revenir avec des photographies de cailloux et de végétaux puis j’ai découvert les terreros, les arènes à ciel ouvert où se déroule la lucha canaria, la lutte canarienne », explique l’artiste parisienne. Adepte de la sérendipité, la photographe se documente sur ce sport puis s’immisce au fil des jours dans les entraînements et les compétitions. Elle retournera même à plusieurs reprises sur l’archipel afin de rencontrer de nouvelles équipes de cette discipline populaire et assister au spectaculaire carnaval, réputé pour être le second plus grand au monde après celui de Rio de Janeiro. Ex Voto condense de gros plans de personnes costumées et de lutteur·ses pour illustrer les us et coutumes ainsi que toute l’énergie qui découle de ces évènements. « Cette série est née de la volonté de célébrer différentes typologies de corps, qu’ils soient sportifs ou festifs, et de les entremêler. J’ai photographié avec des cadrages très serrés des jambes, des bras, des joues, si bien que le titre s’est imposé en référence aux ex-voto anatomiques », précise-t-elle. En saisissant ces scènes de liesse à l’aide d’un flash, Céline Guillerm honore les corps et les festivités caractéristiques de l’archipel.
Noémie Lecampion et Léo Duthoit
Noémie Lecampion et Léo Duthoit sont à l’origine de Candide, un projet commun qui s’intéresse aux notions d’identité et d’appartenance, tout en interrogeant ce qu’incarnent les jeunes adultes dans des sociétés régies par des normes. « À 25 ans, j’entends mes proches répéter que j’ai le temps, que je suis jeune. Ma mère me dit de faire ma vie comme bon me semble tout en précisant que c’est éphémère et qu’il faut en profiter. Mais la vérité, c’est qu’à cet âge, elle était mariée, élevait déjà des enfants. On se rend compte que certain·es de nos ami·es s’installent en couple et que d’autres se marient, achètent leur appart ou leur maison, pressé·es de copier ce modèle “idéal” », assure le duo. Employant aussi bien des boîtiers argentiques, instantanés ou une caméra, il entremêle les approches pour donner à voir deux réalités qui découlent d’une même relation. Par ce biais, les deux artistes entendent ainsi déconstruire la vision du couple et des évènements censés l’animer. « Cette série, ce sont deux êtres, deux jeunes, qui ne le sont plus, non pas selon leur âge, mais selon la pression sociale », concluent-ils.