Tourmentées par des souvenirs de leur enfance, Shiori Ota et Lena Bühler, nos coups de cœur de la semaine, ont choisi la photographie comme thérapie. Tandis que l’une dresse un portrait inclusif du monde souvent impitoyable du mannequinat, l’autre dévoile avec poésie ses émotions, ses peurs et ses rêves.
Shiori Ota
« Lorsque j’étais adolescente, je ne me sentais pas à l’aise avec la vision que j’avais de mon corps, car je ressentais une forte pression pour devenir plus mince et ressembler aux “normes de beauté de la société”, qui sont représentées dans les magazines de mode, les publicités et bien d’autres choses encore », se souvient Shiori Ota. Officiant aujourd’hui dans cette industrie, la photographe japonaise essaye, au travers de chacune de ses séries, de « [se] prouver que, quelle que soit son apparence, on peut toujours briller à sa manière ». Aussi Giant Pink Star, imaginée en collaboration avec la styliste tokyoïte Yuna Kume, ne fait-elle pas exception à la règle. À l’image, des mannequins de diverses corpulences se révèlent telles qu’elles sont, dans des espaces familiers aux nuances édulcorées. Bien loin du stress que peuvent occasionner les métropoles et leur quotidien affairé, le bien-être domine et le temps passé en ligne se multiplie. « Je m’inspire souvent de mes expériences négatives pour les transformer en œuvres qui me donnent une énergie plus positive. Ici, je souhaitais créer une sorte d’évasion », achève l’artiste.
Lena Bühler
À travers The Wall of Silence, Lena Bühler interroge le malaise qui l’a envahie suite à un événement douloureux, les souvenirs qui restent et les émotions refoulées. Originaire de Suisse, la photographe quitte son pays en 2022 pour déménager en Suède afin d’explorer sa pratique artistique et ses racines suédoises. « À l’âge de 7 ans, un professeur m’a dit que je pleurais trop. Depuis, j’ai tout intériorisé, mais les émotions bouillonnaient encore en moi. Dès que j’ai rejoint la Suède, mon cœur s’est étonnamment détendu, la peur et la colère se sont lentement calmées. Avec la distance, j’ai réalisé que je devais revenir à la haine que je ressentais pour briser l’armure que j’incarnais. C’est ainsi que j’ai enfin trouvé la paix », confie l’artiste. Se définissant elle-même comme une personne silencieuse, réservée et observatrice, Lena Bühler compose un univers imprégné d’une lumière vive et blanche pour mieux conter l’isolement, les rêves et la douleur. « Capturer une image est un exercice intuitif et sensible qui me permet de libérer ma voix. Je mémorise des moments et des pensées pour en faire des images calmes et poétiques. Les impressions floues, les figures qui s’estompent et les paysages lumineux me captivent », précise-t-elle. En s’inspirant des projets liés à l’identité et à l’invisible de SMITH, Lena Bühler partage à cœur ouvert des visuels aussi doux que percutants qui agissent pour elle comme une thérapie.