Des premiers émois photographiques aux coups de cœur les plus récents, les auteurices publié·es sur les pages de Fisheye reviennent sur les œuvres et les sujets qui les inspirent particulièrement. Aujourd’hui, Esther Gabrielle Kersley nous plonge dans son univers nourri des théories du complot.
Si tu devais ne choisir qu’une seule de tes images, laquelle serait-ce ?
Probablement cette image [à gauche, NDLR] de la série The Fifth Generation. Elle me met mal à l’aise.
La première photographie qui t’a marquée et pourquoi ?
Il m’est difficile de me rappeler quelle fut la première, mais je me souviens avoir été captivée par l’œuvre de Man Ray, en particulier par son portrait de Dora Maar de 1936, dont j’avais une carte postale. C’est un portrait intense et direct, mais en même temps surréaliste et onirique.
Un shooting rêvé ?
De faux animaux, des plantes mortes, des villes fantômes et un centre de données.
Un ou une artiste que tu admires par-dessus tout ?
J’admire beaucoup El Lizzitsky. Je pense qu’il était très en avance sur son temps. Je suis obsédé par son Autoportrait (Le Constructeur) de 1924. J’admire aussi beaucoup les artistes qui changent de support et de sujet tout en restant fidèles à leur univers. Je pense que cela témoigne d’une véritable intrépidité. Je viens de regarder l’incroyable Occupied City de Steve McQueen, et j’ai l’impression qu’il fait cela si bien. Passant de l’art conceptuel aux documentaires et aux films, il est motivé par l’idée et par la meilleure façon de la communiquer.
Une émotion à illustrer ?
L’anxiété.
Un genre photographique, et celui ou celle qui le porte selon toi ?
J’adore le photomontage. Bien sûr, la palme revient aux dadaïstes, aux constructivistes et aux surréalistes ! J’aime particulièrement le travail de Max Ernst et d’El Lissitzky. Beaucoup d’artistes aujourd’hui utilisent le montage et le collage de manière très intéressante.
Un territoire, imaginaire ou réel, à capturer ?
Internet.
Une thématique que tu aimes particulièrement aborder et voir aborder ?
Notre relation à la technologie, le croisement entre notre monde réel et notre monde en ligne, les récits contradictoires et ceux qui se compliquent, le passé qui apparaît dans le présent, la zone grise entre la vérité et la fiction.
Un événement photographique que tu n’oublieras jamais ?
L’exposition de la Deutsche Borse, en 2019, à la Photographer’s Gallery de Londres, où j’ai vu Meditations de Susan Meiselas et On Abortion de Laia Abril. Ces deux artistes utilisent la photographie de manière très pertinente. J’ai eu l’impression qu’elles avaient quelque chose de nouveau à dire et qu’elles pouvaient vous faire réfléchir différemment sur des sujets importants. J’ai été très enthousiaste à l’idée de voir ce dont la photographie documentaire est capable.
Une œuvre d’art qui t’inspire particulièrement ?
Il y en a deux : 2001: A Space Odyssey (1968) de Stanley Kubrick and Man with a Movie Camera (1929) de Dziga Vertov.