Safari en vitrine, taxidermie et kitsch à New York City

24 mars 2021   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Safari en vitrine, taxidermie et kitsch à New York City

Sujets insolites ou tendances, faites un break avec notre curiosité de la semaine. Dans Upper West Side Safari, Adam Powell souligne, avec humour, l’absurdité des dioramas exposés au Musée d’Histoire Naturelle de New York.

Photographe britannique installé à New York depuis cinq ans, Adam Powell a réalisé l’impossible : capturer un safari en plein cœur d’une métropole. Prises au flash, ses images détonnent. Autruches, gazelles, pingouins, léopards apparaissent, figés dans des postures absurdes, leurs ombres traçant des silhouettes grotesques sur les fonds colorés. C’est au cœur du Museum d’Histoire Naturelle de la Grosse Pomme que l’auteur a réalisé Upper West Side Safari. Un lieu culturel abritant une impressionnante collection de taxidermie. « Le musée est une véritable pépite. Il n’a pas été rénové depuis des années, et lorsqu’on y entre, on a l’impression de voyager dans le temps. Si les dioramas sont splendides – les peintures remarquables servent de décors aux animaux empaillés et aux fausses plantes hyperréalistes – comparés aux documentaires de David Attenborough, ils peuvent sembler démodés. Au fil des décennies, ils ont développé un certain charme, un peu embarrassant, que je souhaitais mettre en lumière à travers mes photos », raconte l’auteur.

© Adam Powell© Adam Powell

Confronter le réel à sa dimension surréaliste

C’est en arrivant aux États-Unis qu’Adam Powell se lance dans la photographie. « Mon père m’avait donné son vieux boîtier, et je me suis servi du médium pour explorer mon nouvel environnement », se souvient-il. D’abord passionné par les cultures en marge pullulant dans les quartiers de New York, il s’intéresse aujourd’hui aux « clichés sans gens » – une nouvelle manière de capturer le monde, née durant la crise sanitaire. « Je ne pouvais plus me promener dans la ville, je me suis donc concentré sur ces images que je trouvais drôles », poursuit-il. Avec un humour sans faille, le photographe s’applique aujourd’hui à révéler, grâce à une esthétique décalée, l’amusant, l’insensé de notre quotidien.

Inspiré par le livre Unnatural History de Steven Davis, qui avait, lui aussi, photographié la curieuse intemporalité du musée américain, Adam Powell cherche, dans Upper West Side Safari, à confronter le réel à sa dimension surréaliste. Prises au flash, ses images mettent l’accent sur les gueules des animaux, mis en scène dans des actions feintes. « Je me suis toujours demandé comment mon style s’appliquerait à la photographie de nature. Prendre des photos d’animaux morts dans des vitrines m’a semblé être une alternative plus sûre et moins chère que de tenter un véritable safari », s’amuse l’auteur, qui, après avoir shooté des mouettes, pigeons, rats et écureuils dans les rues de New York, souhaitait « toucher à l’exotique ». Un ensemble marquant. Aussi absurdes qu’hilarants, les clichés nous renvoient à notre fascination pour le monde sauvage – et à notre envie de le dompter. Si le photographe se défend d’une quelconque démarche éthique, ou environnementaliste, on ne peut s’empêcher, en observant ses compositions, de nous interroger sur nos obsessions. En soulignant l’excentricité de ces dioramas artificiels, Adam Powell parvient, en tous cas, à tourner nos goûts les plus douteux en dérision.

© Adam Powell

 

© Adam Powell© Adam Powell

 

© Adam Powell

 

© Adam Powell© Adam Powell

 

© Adam Powell

© Adam Powell

Explorez
Sidewalk Stills, les déchets des marchés de Charles Negre
Sidewalk Stills © Charles Negre
Sidewalk Stills, les déchets des marchés de Charles Negre
Dans Sidewalk Stills, le photographe français Charles Negre offre un regard sensible sur les déchets qui parsèment les sols des marchés...
29 mai 2025   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Thomas Paquet : « imposer une économie de gestes »
© Thomas Paquet. Vignettage
Thomas Paquet : « imposer une économie de gestes »
À l’occasion du Paris Gallery Weekend, la Galerie Thierry Bigaignon présente, jusqu’au 31 mai 2025, une exposition personnelle de...
29 mai 2025   •  
Écrit par Fabrice Laroche
instax Wide Evo™ : l’alchimie instantanée selon Mathias Benguigui et Jonathan Bertin
© Jonathan Bertin
instax Wide Evo™ : l’alchimie instantanée selon Mathias Benguigui et Jonathan Bertin
Avec son nouveau boîtier instantané, instax™ de Fujifilm propose une promesse audacieuse : faire de chaque cliché un chef-d’œuvre. Afin...
28 mai 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Folle nuit, Québec et désordre : nos coups de cœur photo de mai 2025
© Chris Mann
Folle nuit, Québec et désordre : nos coups de cœur photo de mai 2025
Expositions, immersion dans une série, anecdotes, vidéos… Chaque mois, la rédaction de Fisheye revient sur les actualités photo qui l’ont...
28 mai 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Les yeux dans les yeux, portraits de la collection Pinault
© Annie Leibovitz
Les yeux dans les yeux, portraits de la collection Pinault
À l’occasion de la cinquième édition d’Exporama, la Collection Pinault fait halte à Rennes avec une exposition magistrale sur le...
Il y a 11 heures   •  
Écrit par Costanza Spina
Le  7 à 9 de CHANEL, les visages pluriels d’Omar Victor Diop
© Omar Victor Diop
Le 7 à 9 de CHANEL, les visages pluriels d’Omar Victor Diop
Troisième invité du cycle "Le 7 à 9 de CHANEL", le photographe sénégalais Omar Victor Diop a offert au public du Jeu de Paume un moment...
30 mai 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Huá biàn : quand la musique se rebelle
Love, de la série Huá biàn © Agathe Veidt
Huá biàn : quand la musique se rebelle
Agathe Veidt saisit la fête et les chants de révolte au cœur d’une boîte de nuit de renom à Shenzhen. De retour en France, elle tricote...
29 mai 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Sidewalk Stills, les déchets des marchés de Charles Negre
Sidewalk Stills © Charles Negre
Sidewalk Stills, les déchets des marchés de Charles Negre
Dans Sidewalk Stills, le photographe français Charles Negre offre un regard sensible sur les déchets qui parsèment les sols des marchés...
29 mai 2025   •  
Écrit par Lou Tsatsas