Jusqu’au 9 décembre, Camera Obscura à Paris présente SMOKE/NEW YORK, une exposition dédiée à Michael Ackerman, le photographe qui a commencé par arpenter les rues de New York pour ensuite suivre les artistes underground d’Atlanta qui habitent le quartier de Cabbagetown. Aujourd’hui, les deux séries iconiques sont réunies dans un livre publié chez la nouvelle maison d’édition l’axolotl.
L’exposition SMOKE/NEW YORK, à la galerie Camera Obscura,rassemble deux séries iconiques du photographe Michael Ackerman. A l’origine de sa passion pour la photographie, c’est l’histoire du déracinement de sa famille qui le pousse à s’intéresser au sort des vulnérables, de celles et ceux qui vivent en marge. Le photographe qui définit son identité comme « un mystère » et sa maison comme un « concept vague », est enfant d’une famille israélienne ayant émigré à New York en 1974. Son écriture photographique est immédiatement reconnaissable, par sa force d’évocation et par les images labyrinthiques et tourmentées qu’il crée, notamment dans la série consacrée à Bénarès. Elle fait l’objet d’une publication chez Robert Delpire en 1999, titrée End Time City, et c’est la découverte d’un nouveau talent iconoclaste. Dans l’exposition à Camera Obscura, sont réunies deux de ses séries majeures : NEW YORK¸ dans laquelle il a arpenté les rues de la ville en quête de récits extraordinaires, et SMOKE¸ qui est le résultat de ses années à traîner avec la scène artistique émergente d’Atlanta. Les deux, font l’objet d’un livre, publié chez l’axolotl, nouvelle maison d’édition de Caroline Bénichou. « Je suis certain d’être devenu photographe à cause de l’histoire de déracinement et d’exil de ma famille, écrit Ackerman. La photographie a été un nouveau langage, une voix et un moyen de me connecter à une humanité souvent fragile et vulnérable. C’est une exploration de lieux et de personnes profondément stratifié·es, hanté·es et transformé·es ».
SMOKE : histoire d’une rencontre
SMOKE est la série qui définit le style photographique d’Ackerman, conteur d’histoire de rue, ayant tiré le portrait d’une Amérique autrement invisible. Les contre-cultures le passionnent et il vit au rythme de la scène artistique d’Atlanta, puis de New York. En 1996, Michael Ackerman rencontre Benjamin, créateur du groupe Smoke : musicien, poète, figure de l’underground, personnage charismatique et touchant par son énergie vitale, son art, sa fragilité. Pendant les deux années qui suivent, le photographe suit les aventures du groupe, mais aussi des artistes et personnages inclassables qui font le cœur de Cabbagetown, le quartier populaire d’Atlanta dans lequel Ackerman habite. Le photographe et le musicien se rencontrent après un concert, alors que Benjamin traînait dans sa chambre d’hôtel avec les amis. Entre la fumée de cigarette, les ris et les discussions animées, le photographe se retrouve invité dans un contexte qui met à l’épreuve sa timidité. Mais Benjamin le met de suite à l’aise, par son charisme et sa tendresse naturelle. « Je me suis assis dans un coin, émerveillé et intimidé, et je suis resté silencieux. J’ai peut-être pris quelques photos, peut-être pas. Vers quatre heures du matin, je me suis endormi par terre dans une autre pièce, écrit Ackerman. Quelques heures plus tard, je me suis réveillé, j’ai regardé dans sa chambre et je l’ai vu endormi, lui aussi par terre, devant son lit. Aujourd’hui, 27 ans plus tard, j’essaie de me souvenir de ce que j’ai ressenti en le voyant étendu là, si fragile. J’ai pris une photo à l’époque, je l’ai pris dans mes bras et je l’ai porté jusqu’à son lit, puis je suis sorti dans la lumière du jour pour découvrir Cabbagetown. » SMOKE est avant tout l’histoire d’une rencontre : celle entre deux façons de dire et d’écrire le réel, entre deux artistes qui ont dépassé les mots pour se comprendre. Dans le livre, la série est accompagnée des textes de Benjamin, Jem Cohen et Patti Smith.