Entre shootings de mode et expérimentations esthétiques, la photographe française Faustine Martin développe un univers frais et coloré, et encapsule une vision unique de la femme – dans l’objectif d’une femme.
De la mode aux déchirures, de l’éditorial au collage, les images de Faustine Martin détournent les codes, jouent avec les corps et les paysages pour construire un monde pétillant. C’est après des études de pharmacie que l’artiste, née à Marseille en 1990 décide de repenser sa vie, et de se tourner vers la photographie. « Un matin, je me suis réveillée avec une bouffée d’audace, et je me suis demandé : pourquoi m’interdire ce rêve ? », se souvient-elle. Autodidacte, spontanée, elle ne s’interdit, depuis, rien, et fonctionne à l’instinct. « Quand j’organise mes projets, je construis une trame, un mood, pour que mes équipes comprennent l’idée, mais je me laisse toutes les libertés. Les thèmes qui m’inspirent ? Le soleil, le mélange du bleu et de l’orange, les moments suspendus, l’architecture vintage, les ratés, les imperfections, les détails de l’ordinaire, la délicatesse, les mouvements discrets, les couleurs sombres, la fin du jour, 18h le soir en été… », poursuit-elle.
Admirative des tableaux de Miro et d’Egon Schiele, tout comme des œuvres emblématiques de Martin Parr, William Eggleston ou encore Christopher Anderson, Faustine Martin s’attache à peindre des images qui marquent. Qui impriment, dans le regard du spectateur, des couleurs vives, des émotions fortes. Une joie libératrice et contagieuse transforme notre environnement en un terrain de jeu et de possibles qu’il nous faut arpenter sans la moindre réserve.
Une certaine liberté
Et, au cœur de ces créations, se trouvent les femmes. Si la photographe n’a jamais – consciemment – souhaité placer le genre au centre de son œuvre, sa vision marque une volonté de sortir des sentiers battus. « Dès mes débuts, j’ai eu envie de poser un regard féminin sur la femme, de rester éloignée des codes de la société et du métier de photographe, longtemps dominé par la vision masculine. Je voulais montrer leur beauté brute et simple », confie-t-elle. C’est le lien de sororité, que l’autrice défend. Une relation forte, honnête, qu’elle entretient avec ses modèles. Dans ses clichés, les dos se courbent, les visages apparaissent nus, les yeux souvent cernés – « ils racontent leurs vies, leurs histoires, loin des maquillages parfaits de certains shootings », précise-t-elle. Des silhouettes étonnantes, uniques, qui soulignent un charme naturel, loin du male gaze imposé par notre société.
« Mes modèles deviennent souvent des petites sœurs ou amies pour moi, c’est une vraie confiance, sur le long terme, qui s’installe. La photo de Laura (ci-dessous, NDLR) raconte bien cette histoire. C’est avec elle que j’ai fait mon tout premier photoshoot professionnel. Elle avait alors une quinzaine d’années. Je me souviens de son book – beaucoup de maquillage, un charbonneux noir, avec de longs cheveux raides – j’avais du mal à me projeter. À la fin se trouvait une image d’elle au naturel, c’était une révélation », raconte l’artiste. Si Laura, âgée aujourd’hui de vingt ans, se préfère davantage apprêtée, elle se dévoile avec toujours autant d’aise face à l’objectif de Faustine Martin. Un échange sans complexe, fruit d’une confiance mutuelle, révélant une autre forme de beauté. « Sa peau bronzée contraste parfaitement avec le bleu de l’image. Elle a su rendre cette image fraîche et solaire. J’aime sa pose un peu penchée, les yeux fermés, le léger vent que l’on ressent. Il s’en dégage une certaine liberté », conclut la photographe.
© Faustine Martin